Comment l’agriculture peut-elle s’adapter pour être plus écologique ?
L’empreinte écologique de l’agriculture sur notre planète est désormais largement connue. Aujourd’hui, l’agriculture est à prendre en compte de manière importante dans le processus de transition écologique. La transition vers des pratiques agricoles plus durables requiert une adaptation tant au niveau national que régional mais aussi mondial. Cela implique à la fois le développement de compétences et l’allocation de ressources adéquates.
Cet enjeu complexe doit également prendre en compte la nécessité croissante de répondre aux besoins alimentaires d’une population mondiale en expansion, tout en préservant la sécurité alimentaire.
Une étroite relation entre l’agriculture et la biodiversité
Les agriculteurs cherchent à optimiser le rendement et la qualité de leurs récoltes pour répondre à la demande alimentaire croissante tout en conservant leur rentabilité. Cela nécessite donc pour eux de protéger leurs cultures contre les ravageurs.
Ainsi l’un des défis majeurs de l’agriculture est de concilier la production alimentaire avec la préservation de la biodiversité. La biodiversité, tant animale que végétale, sont actuellement menacées par le dérèglement climatique et les produits phytopharmaceutiques. Pourtant cette biodiversité joue un rôle principal dans le maintien de l’équilibre des écosystèmes en assurant des services tels que la production d’oxygène, la pollinisation et la fertilité des sols.
La variété des espèces permet notamment aux systèmes agricoles de mieux résister aux ravageurs des cultures.
Par exemple, la coccinelle s’attaque aux pucerons nuisibles aux arbres fruitiers, tandis que les carabes sont des prédateurs des limaces qui endommagent les cultures. Ces insectes, considérés comme des alliés précieux des agriculteurs, sont connus sous le nom d’auxiliaires, et leur présence est un indicateur de la santé des sols et des écosystèmes.
Les agriculteurs doivent préserver cette biodiversité, qui est non seulement essentielle pour l’équilibre des écosystèmes, mais également pour la protection des cultures. Cependant, certaines maladies et ravageurs non pas de solutions via un auxiliaire et l’emploi de produits phytosanitaire reste privilégié. Sans compter l’aspect économique de cette problématique qui est souvent en faveur de solutions peu respectueuses de l’environnement car moins onéreuses. Alors faut-il nécessairement faire un choix entre quantité, qualité et durabilité ? C’est ce que notre article va tenter d’élucider.
Peut-on réellement effectuer la transition d’une agriculture intensive vers une agriculture durable ?
Face aux défis posés par le réchauffement climatique, la diminution des ressources naturelles telles que l’eau et l’appauvrissement des sols, la réponse ne peut être que positive. Partons de cette réalité pour esquisser les contours d’une agriculture durable en nous appuyant sur les pratiques déjà existantes. Il faut souligner qu’il ne s’agit pas d’une solution globale, mais plutôt de quelques orientations clés. Ces dernières visent à améliorer la gestion des ressources et de l’énergie dans le secteur agricole, tout en inscrivant cette activité dans une perspective de durabilité. En analysant de près les données disponibles, nous constatons que cette transition semble de plus en plus réalisable.
Des initiatives visant à réduire la pollution de l’eau et de l’air
Sur des terrains où l’eau de pluie s’écoule plus qu’elle ne s’infiltre, les contaminations par les engrais, le fumier, les nitrates, les phosphates et les pesticides deviennent rapidement apparentes.
La pollution des eaux souterraines par les produits chimiques et les déchets agricoles est alarmante. L’excès de nutriments est particulièrement responsable de la prolifération d’algues dans les plans d’eau, entraînant la mort des plantes et des animaux aquatiques.
Selon l’ADEME, entre 40 et 80 % des émissions de gaz à effet de serre liées à la production alimentaire sont imputables à l’agriculture. Les engrais deviennent problématiques en termes de pollution de l’eau lorsqu’ils sont appliqués en quantités excédant la capacité d’absorption des cultures ou lorsqu’ils sont emportés par le vent ou l’eau avant d’être assimilés.
En améliorant leur efficacité, ces engrais pourraient être utilisés de manière plus mesurée, conformément aux prévisions de production végétale à l’horizon 2030, qui envisagent une réduction de l’utilisation des engrais azotés de l’ordre de 37 %. L’avenir réside dans une augmentation de l’utilisation de pesticides et fongicides plus ciblés, de produits de bio contrôle, de variétés de cultures plus résistantes et de méthodes écologiques de lutte intégrée contre les ravageurs.
Les agriculteurs peuvent également recourir à des dispositifs dissuasifs respectueux de l’environnement pour protéger leurs cultures, comme l’utilisation de dispositifs effaroucheurs à gaz ou sonores.
Développement durable et agriculture : des principes violés
Les bases de l’agriculture durable ont été compromises par l’avènement de l’agriculture intensive et ses pratiques, notamment :
- La généralisation de la monoculture ;
- Le recours massif à l’épandage de pesticides et d’engrais azotés minéraux sur les sols et les cultures ;
- L’utilisation de machines agricoles fonctionnant à partir d’énergie fossile.
Parallèlement à ces pratiques, une évolution dans le langage utilisé dans le domaine agricole est à noter : les termes « paysans » ont été supplantés par « exploitants agricoles ». De même, les fermes traditionnelles sont peu à peu remplacées par des exploitations agricoles.
Une transition vers un retour à des pratiques agricoles durables
Pour être plus écologique, l’agriculture doit retourner vers des pratiques durables. Cela inclus :
- la réduction de l’utilisation de pesticides, fongicides, herbicides et d’engrais chimiques
- la promotion de l’agroécologie
- ainsi que la mise en place de techniques de conservation des sols.
La rotation des cultures, l’agroforesterie et la permaculture sont autant d’approches qui favorisent la régénération des sols et la préservation de la biodiversité.
La lutte contre la dégradation des sols
L’agriculture est directement impliquée dans l’érosion des sols, que ce soit dans les régions montagneuses, les plaines ou les plateaux. Ce phénomène se traduit par le déplacement et le dépôt de sédiments, entraînant à long terme une diminution de la qualité des sols, une diminution de la fertilité des cultures, ainsi que des risques de destruction d’infrastructures telles que les routes, les réseaux de drainage et les habitations.
Pour prévenir l’érosion des sols, certains agriculteurs optent pour des techniques telles que le semis direct, abandonnant ou délaissant ainsi le labour et l’utilisation de tracteurs au profit de la traction animal.
Diminuer la consommation d’énergie associée à l’activité agricole
Pour réduire l’empreinte énergétique de la production agricole, il faut prendre des mesures efficaces. Les chiffres témoignent de l’ampleur de cet enjeu : en moyenne, une exploitation agricole dépense environ 7800 euros par an en énergie directe, dont 5100 euros sont alloués aux carburants et aux combustibles.
Une approche prometteuse pour atténuer ces conséquences énergétiques consiste à promouvoir l’autoconsommation agricole. Cette pratique, déjà adoptée par de nombreux foyers français, peut être adaptée au secteur agricole en utilisant notamment l’énergie photovoltaïque. En introduisant des systèmes d’agro-voltaïque, on pourrait observer l’émergence de fermes autonomes, une tendance déjà observée au Canada.
Les vastes surfaces disponibles sur les exploitations, notamment sur les toits des bâtiments d’élevage, offrent des possibilités intéressantes pour l’installation de panneaux solaires à grande échelle. L’Institut de l’élevage souligne qu’il serait envisageable d’équiper environ 40 % des nouvelles constructions en élevage ruminant de panneaux solaires.
Le défi posé par l’initiative « 4 pour 1000 » et les politiques agricoles européennes pour l’agriculture à venir
Lancée par la France lors de la COP21 en 2015, l’initiative « 4 pour 1000 » représente un défi majeur pour l’avenir de l’agriculture. Son objectif est de favoriser la transition écologique du secteur agricole en promouvant des pratiques adaptées aux réalités locales, environnementales et économiques, telles que l’agro-écologie, l’agroforesterie et la gestion des paysages.
Cette initiative vise également à renforcer la résilience de l’agriculture face aux changements climatiques en améliorant la qualité des sols
En effet, ces pratiques en améliorant la qualité des sols pourraient permettre d’augmenter leurs capacités à stocker du carbone. Ainsi une augmentation de 0,4% ou 4 pour 1000 chaque année de cette capacité naturelle des sols à stocker le carbone permettrait de stopper l’augmentation de la concentration de CO2 dans l’atmosphère.
Parallèlement, l’Union européenne réoriente ses subventions agricoles en faveur des agriculteurs qui s’engagent dans des pratiques respectueuses de l’environnement. Les mesures agri-environnementales et l’agriculture biologique sont ainsi encouragées et développées de manière variable selon les pays européens, avec des taux de cultures biologiques oscillant entre 2 % et 6 % dans la zone OCDE.
Encouragement de l’agriculture biologique
L’agriculture biologique offre une alternative plus respectueuse de l’environnement en limitant l’utilisation de produits chimiques de synthèse et en privilégiant les méthodes naturelles de lutte contre les nuisibles. Encourager la conversion vers des pratiques biologiques, par le biais de subventions et de certifications, permet de soutenir les agriculteurs dans cette transition et de répondre à la demande croissante des consommateurs pour des aliments plus sains et plus durables.
Des formations diplômantes tournées vers l’avenir
Les formations aux métiers de l’agriculture évoluent pour répondre aux nouveaux défis du secteur :
Les programmes de diplômes tels que le bac pro CGEA (Conduite et Gestion de l’Exploitation Agricole) et le BTSA ACSE (Analyse et Conduite de Systèmes d’Exploitation) ont été adaptés pour intégrer les principes de l’agro-écologie. Ces programmes incluent désormais l’acquisition de compétences innovantes telles que l’amélioration de la fertilité biologique des sols ou l’utilisation de pratiques visant à prévenir l’érosion.
Les professionnels du secteur doivent être en mesure de gérer stratégiquement leur exploitation en se basant sur une analyse approfondie des agrosystèmes. Cette évolution nécessite une approche de réflexion différente ainsi qu’une maîtrise des connaissances en agronomie, en écologie et en économie.
Agriculture durable : des pratiques ancestrales au service du développement durable
L’agriculture durable représente en réalité un retour aux pratiques traditionnelles. Bien que cette affirmation puisse sembler exagérée, une analyse approfondie des principes de développement durable qu’elle incarne montre que cette assertion n’est pas si éloignée de la réalité. Parmi ces principes, cinq ont été sélectionnés pour répondre directement aux défis de durabilité, de pollution de l’air et du sol :
- Diminution de l’utilisation d’engrais azotés minéraux et arrêt de l’épandage de pesticides.
- Mise en place d’une gestion plus efficace des ressources en eau, notamment par le recyclage de l’eau de pluie et la réduction du pompage dans les nappes phréatiques.
- Conservation des ressources génétiques, notamment des semences avec un retour vers des variétés ancestrales et oubliées .
- Préservation de la biodiversité en aménageant des pâturages naturels.
- Lutte contre la désertification.
En respectant ces objectifs, les agriculteurs de tous horizons pourraient contribuer à instaurer une agriculture durable. Les pratiques abordées dans cet article restent un héritage qui doit retrouver sa place dans des structures agricoles profondément différentes. Cet héritage remis en adéquation avec la dimension économique d’une exploitation agricole actuelle peut permettre la transition de l’agriculture vers un modèle durable et Perrin.